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Le marché lucratif des prépas privées

Isabelle Rey-Lefebvre | Le Monde | 23/11/2011

lundi 30 janvier 2012, par Mathilde Brugier

Pour être reçu à un concours, il ne faut pas seulement être bon, il faut être meilleur que ses concurrents. Du coup, la demande de sessions privées s’amplifie, chaque étudiant ayant une bonne raison de suivre une prépa dans un enseignement supérieur de plus en plus sélectif. Rien d’étonnant par ailleurs dans un pays champion d’Europe du soutien scolaire privé dans le secondaire, avec un marché estimé en juin 2011 à 2,2 milliards d’euros par la Commission européenne.

Les filières classiques menant à Sciences Po ou en 2e année de médecine ont, de longue date, suscité une offre de préparations diverses pour franchir la barrière du concours. Aujourd’hui, de nombreuses autres filières deviennent plus sélectives, comme les professions administratives et juridiques (gestion d’hôpitaux, de collectivités locales...), de santé et paramédicales (kinésithérapeute, opticien, infirmier, sage-femme...), de la communication, sociales (éducateur spécialisé, assistante sociale...) ou encore le vaste domaine des arts et arts appliqués.

En fait, chaque concours suscite la création d’une formation privée ad hoc, qui peut être intensive sur une semaine ou deux ou s’étaler au long d’une année scolaire. L’ensemble des postulants constitue un vivier de plusieurs centaines de milliers de clients potentiels.

"Si vous êtes préparé à une épreuve ou un concours, vous avez logiquement plus de chances de le réussir", estime Patrick Noël, normalien et fondateur, en 1974, d’un des groupes les plus actifs dans ce domaine, Ipésup-Prépasup.

Chaque année, son institut accueille, dans ses locaux parisiens, au pied de Notre-Dame, 300 étudiants à temps plein. S’y ajoutent 5 000 autres, venus suivre une ou plusieurs sessions, dans une quinzaine de prépas aux écoles de commerce, à Sciences Po, aux écoles de journalisme ou à l’expertise comptable. Le chiffre d’affaires global du groupe, en 2010, dépassait 11 millions d’euros, avec un bénéfice de près de 1,9 million d’euros. "Nous gagnons bien notre vie, beaucoup mieux qu’à l’éducation nationale", admet M. Noël. Se préparer chez eux aux écoles de journalisme à raison d’une après-midi par semaine pendant seize semaines est proposé, en 2012, au tarif de 2 500 euros et a attiré, en 2011, 90 candidats. De tels résultats ont bien sûr donné des idées à d’autres.

Numéro un du soutien scolaire à domicile dans le secondaire, Acadomia a construit son modèle sur la réduction d’impôts. Cette niche fiscale étant mise en cause, l’entreprise s’oriente désormais, avec la marque Spésup, vers les prépas d’enseignement supérieur et les cours collectifs pour 10 à 12 élèves, nettement plus rentables que les individuels. "Pour le soutien scolaire, nous avons les parents au téléphone, mais, pour ces prépas, c’est l’étudiant lui-même qui nous contacte. Il se montre très exigeant, curieux sur le niveau des cours et la formation des enseignants", explique Philippe Coléon, directeur général d’Acadomia. La réorientation de ses activités doit beaucoup aux deux derniers exercices du groupe, déficitaires.

La première année commune aux études de santé, qui, selon le classement et les voeux de l’étudiant, ouvre sur les métiers de médecin, pharmacien, dentiste, sage-femme ou kinésithérapeute, est un juteux marché. Numerus clausus oblige, seules 12 000 places sont offertes en deuxième année aux 54 000 marathoniens inscrits en première année d’université. Dans le domaine, les prépas sont légion, et en forte concurrence.

Le groupe Galien, leader du secteur, est présent dans 19 villes universitaires, face à Médisup, Epsilon ou le Centre préparatoire aux carrières médicales (CPCM), sans oublier des prépas plus locales.

Si elles restent sur leur terrain, elles étendent désormais leur offre aux professions paramédicales - orthophoniste, infirmier, psychomotricien, audioprothésiste, manipulateur radio... Il faut compter de 6 500 à 8 500 euros pour y suivre des cours parallèlement à la première année d’université, souvent moins pour les boursiers, qui sont par exemple accueillis gratuitement chez Galien.

Faut-il vraiment en passer par là ? "Bien que nous ne disposions pas de statistiques, nous savons qu’un grand nombre de nos étudiants réussissent sans ces prépas. Dans beaucoup de facs, il existe des cours de soutien, gratuits ou à prix coûtant, assurés par les enseignants eux-mêmes", affirme Benoît Schlemmer, vice-président de la Conférence des doyens des facultés de médecine et doyen de l’UFR de médecine Paris- VII - Diderot. Myriem Belghitialaoui, de l’Association nationale des étudiants en médecine de France, se félicite, elle, "des tutorats organisés entre élèves, une formule plébiscitée par les étudiants, car elle se révèle la plus efficace".

Si la médecine est un large vivier, des milliers d’apprentis artistes qui rêvent d’intégrer les écoles publiques, désormais très cotées, d’arts appliqués comme Boulle, Duperré, Estienne et Olivier de Serres, les Gobelins, les Beaux-Arts ou les Arts décoratifs, constituent un nouveau marché porteur. "Dès la première réunion, je mets nos candidats en garde sur la difficulté d’accès aux grandes écoles publiques d’arts appliqués, quitte à les décourager", explique Emmanuelle Dumoulin, responsable pédagogique de l’Institut supérieur des arts appliqués (Lisaa).


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